Suite à la remise du rapport de la CIASE-SAUVÉ, quelques personnes ont accepté de témoigner, de livrer leur réflexion sur la pédo criminalité dans l’Eglise.
Le rapport SAUVÉ a déstabilisé non seulement l’Église Catholique mais également tous les chrétiens, tout le christianisme. C’est un véritable séisme pour nous tous.
Je suis infiniment triste pour toutes les victimes traumatisées dont on a volé l’innocence et brisé la vie à jamais. Des enfants, des personnes vulnérables, qui avaient toute confiance en des religieux et des laïcs, ont été trompés, manipulés et abusés en toute impunité.
Certains ont pu faire part de leur souffrance mais n’ont jamais été entendus, d’autres ont vécu jusqu’à aujourd’hui ces traumatismes dans le silence.
Comment se reconstruire lorsqu’on a subi de tels crimes ?
Je suis infiniment triste pour les prêtres innocents qui ont été trahis par leurs frères. Pour ceux qui, par vocation, par amour pour Dieu et leur prochain, donnent sans compter de leur temps, de leur sagesse et dont le seul but est de faire connaître notre Seigneur sans rien attendre en retour tandis que d’autres abusent de leur pouvoir et prennent l’innocence des enfants. A cause de ceux qui ont commis de tels actes, ils célèbrent aujourd’hui des offices dans des chasubles éclaboussées par le scandale, tachées par le sang des victimes et trempées par les larmes de Dieu.
Je suis infiniment triste pour notre Seigneur qui est bafoué et offensé. Il pleure avec les victimes. Sans respect pour les Évangiles, des actes innommables ont été perpétrés ; c’est une abomination. Des abus sexuels, il y en a malheureusement dans tous les domaines, dans toutes les professions (la famille, l’éducation, le sport, la culture, les grandes et moyennes entreprises, etc…) et dans l’Église. Non seulement des crimes ont été commis, mais en plus, il y a le silence de ceux qui savaient, qui ont laissé faire, qui se sont rendus complices et coupables.
Le synode sur la synodalité, un début de solution ?
Outre les 45 recommandations inscrites dans le rapport SAUVÉ, depuis le 17 octobre dernier, le pape François a lancé le synode sur la synodalité, c’est-à-dire qu’il demande à tous les baptisés de s’exprimer au sujet de l’Église. Comment la voient-ils ? Quelles sont les réformes à apporter ? C’est vraiment une opportunité qu’il faut saisir. Repenser l’Église est un travail de longue haleine. Sous la conduite de l’Esprit Saint, nous pourrons y arriver.
Gardons la Foi en notre Seigneur.
Claude
J’ai suivi avec beaucoup d’attention la remise du rapport SAUVÉ sur la pédo-criminalité dans notre Église.
Devant l’ampleur du nombre de victimes, je pense en priorité à ces baptisés dont la Vie a été brisée ; j’ai mal à mon Église ; je suis révolté par l’abus d’autorité auprès des enfants.
Mais je me dis aussi qu’un grand nombre de prêtres remplissent leur mission de Pasteur qui consiste, entre autre, à prendre soin des plus fragiles.
J’attends une réaction forte et rapide du conseil épiscopal et du Pape François. Dire que nous avons honte est un premier pas. Il y a urgence à réformer l’Institution qui a failli. Chercher à minimiser, être dans le déni, serait suicidaire pour l’Église. A l’initiative de notre diocèse, cette question est réfléchie depuis trois ans. Un code de “bonne conduite” a été défini et mis en place auprès des responsables qui s’occupent d’enfants.
C’est une bonne initiative. Cela me place dans une perspective d’Espérance mais le chemin est encore long pour retrouver la Paix dans mon Église.
Didier
Quelques réflexions
Ce que révèle ce rapport nous fait honte, tant les abus commis, que leur couverture par l’autorité. Et ne bottons pas en touche en disant : « ailleurs ce n’est pas mieux ». Nous sommes les disciples de ce Jésus qui a souvent mis en valeur les « petits » ; les faibles, les sans voix. Ce contre-témoignage de certains clercs est terrible pour la crédibilité de l’Eglise !
Mais d’un mal peut surgir un bien, c’est le mystère pascal. Faire la vérité en Eglise, en s’en donnant les moyens, est libérateur, « quoi qu’il en coûte ». C’est un appel à mettre le Christ au centre de notre foi et non pas les institutions, finalement très humaines. C’est aussi un rappel nécessaire du « sacerdoce des baptisés » qui nous rend tous responsables de la vie de l’Eglise ; rappel aussi que le seul « prêtre pour l’éternité » est le Christ Jésus.
Cela rend assez dérisoires les titres parfois ronflants distribués en Eglise : « éminence » « nos seigneurs les évêques » ; même le titre de Père donné depuis quelques années aux prêtres est désormais perçu comme ambigu. Plus on met les prêtres sur un piédestal, plus on fausse l’image de leur responsabilité : nous sommes d’abord frères, avec des missions particulières. «Ne vous faîtes pas appeler Maître, car vous n’avez qu’un seul maître et vous êtes tous frères » nous dit Jésus (Mt 23,8).
- La participation effective des laïcs, hommes et femmes, dans les prises de décision en Eglise, à tous les niveaux, devient incontournable – le pape François en donne déjà l’exemple. Le synode à venir sur la « synodalité », ou coresponsabilité, est sûrement un clin d’œil de l’Esprit Saint, et les évêques de France viennent d’ouvrir des chemins nouveaux dans ce domaine.
- Le gros travail fait par la commission Sauvé nous a finalement rendu service, il est un chemin de conversion pour nos regards et nos pratiques. Il devient une référence pour d’autres organismes de la société – d’ailleurs Mr Sauvé est nommé pour mener une enquête du même ordre dans la société civile.
- En conclusion, il nous est donné là une occasion de construire l’Eglise comme peuple de Dieu, sous la grâce de l’Esprit Saint, avec l’audace des prophètes, mais aussi la patience des réalistes. Notre prière accompagnera fidèlement le chemin qui s’ouvre.
Louis
Dans notre diocèse, notre archevêque Monseigneur Luc Ravel a demandé aux coopérateurs en pastoral de remettre une lettre de sa part aux parents qui inscrivent leurs enfants dans un cheminement vers un sacrement. Cette lettre datée du mois d’août 2021 explique entre autres les nouvelles règles en matière d’accueil des enfants : « Les groupes de catéchèse seront accueillis par deux adultes (…) cette règle du binôme s’applique à toutes les activités organisées à l’attention des moins de quinze ans (…)» (Mgr Ravel). Au moment de la remise du rapport de la CIASE, nous étions en pleine période d’inscription à la première des communions sur notre communauté de paroisses.
Lors des rencontres d’inscription, j’ai personnellement abordé le sujet avec les parents. Le fait que notre Archevêque ait pris dès le mois d’août (en réalité même bien avant) des mesures concrètes a permis aux parents de se rendre compte qu’avant même la remise du rapport, ce sujet était au cœur des préoccupations de notre diocèse. Cela a été compris comme un engagement, une volonté de changer nos habitudes ; changements auxquels les parents ont adhéré puisque tous nos groupes se sont pourvus de deux parents accompagnateurs.
Ce qui ressort de ces rencontres avec tous ces parents (environ 200), c’est qu’aussi difficile que soit ce rapport, il est nécessaire pour faire grandir notre Église.
Maud Dalberto
(Coopératrice – pastorale des familles et des enfants)